samedi 11 novembre 2006

Maville.com : les journaux doivent-ils abandonner leur marque sur le Net ?

Je reporte ici un débat entamé par mail avec plusieurs confrères à propos de la sortie de la version béta de la nouvelle formule du site maville.com Produite par le quotidien régional Ouest France, le service maville.com est une marque nationale qui propose aux journaux locaux français une sorte de pack tout prêt pour la publication électronique de leurs infos locales.
Le site est plutôt réussi, même s'il n'innove pas beaucoup (et si je n'aime décidément pas le nom, vieillot et impersonnel) :

- L'accent est mis sur l'info pratique, avec des bases de données d'infos services et de loisirs (ciné, sorties) impressionnantes.
- Le site propose un début de communauté avec la possibilité offerte aux internautes de donner leur avis sur les restaurants, les bars et les films, sur le modèle de cityvox.
- Toute l'info locale du journal y est proposée gratuitement. Et on voit apparaître dans une fenêtre en haut à gauche une poignée de breaking news envoyées en direct et en bref par les journalistes du quotidien.
- Enfin, les petites annonces bonnes affaires, emploi de proximité et auto sont gratuites. Ce qui, pour un quotidien régional, est déjà une belle audace.

Le réseau maville.com, pour l'instant limité à la Bretagne et la Normandie va bientôt s'agrandir puisqu'un certain nombre de quotidiens régionaux, comme La Provence et Nice Matin par exemple, envisagent de l'adopter en 2007.

En fait, au delà de son côté clef-en-main, bien pratique pour se lancer rapidement dans la bataille, maville.com répond à la problématique de la publication de la petite locale sur le Net. Problématique dominée par l'angoisse de la canibalisation et le débat gratuit/payant (largement développé sur ce blog). Maville.com est une façon de proposer un produit spécifique web alimenté en grande partie par le contenu hyperlocal du quotidien régional, mais sans donner l'impression de mettre le journal gratuitement sur Internet. Ce qui est pourtant le cas.

Hier, un ami, responsable d'un quotidien, me posait la question : "Doit-on jouer la marque unique ou la complémentarité des marques ? En gros un portail du quotidien régional et ma ville dedans ou un site "institutionnel" avec du payant, des archives…et un réseau de sites style maville en parallèle."
J'ai répondu un peu rapidement en faveur de la première solution. Sauf en cas de blocage au sein du journal sur le passage de la locale en gratuit. Auquel cas l'option 2 permettrait de travailler librement sans réveiller le volcan.

Mais la première option n'est pas entièrement satisfaisante non plus, à mon avis. Pourquoi ?

- Mettre le journal en ligne n'est pas une solution à terme. Cela permet de créer du contenu attractif (la petite locale) et donc du trafic. Mais parce que la cible et le support sont différents, l'info locale ne doit pas être la même. Ni les mêmes sujets (faut-il mettre en ligne l'expo du troisième âge ?), ni la même forme (faut-il publier des papiers de plus de 1500 signes en petite locale ?), ni les mêmes matériaux (une seule ou plusieurs photos ? Et pourquoi pas de la vidéo à la place des photos?), ni le même temps (pourquoi se limiter à l'info du matin alors que l'on peut proposer l'info 24/7?), etc. Question : comment on fait pour ne pas dépenser des millions supplémentaires ? Il y a des solutions.

- Si l'on propose un contenu et un ton différents de ceux du quotidien régional, comment le communiquer, notamment à ceux qui rejettent l'image du journal ? Comment afficher la différence ? Et comment adopter un ton plus décalé, plus libre, sans porter atteinte à la marque, plus traditionnelle du journal ? Faut-il créer une marque spécifique, autour du nom de la commune par exemple ? Mais dans ce cas, ne risque-t-on pas de perdre le bénéfice de la marque ? Et de rater en plus une occasion de moderniser cette dernière sur sa spécialité : la locale ? Peut-on réfléchir à une solution intermédiaire ?

Qu'en pensez-vous ?

9 commentaires:

Anonyme a dit…

bonsoir Benoît! ;-)

Et bien, que de questions!

C'est bien si Maville.com prend.

À Libération, il y a quelques années, nous nous étions rapprochés dans un premier temps de ParisAvenue.com (qui aujourd'hui mène à une vulgaire page de liens sponsorisés), puis du réseau Viapolis.com (une initiative espagnole, d'ailleurs maintenant on arrive sur le site du groupe Vocento).
Aucune de ces initiatives n'avait finalement donné naissance à quelque chose de concret.
Le groupe Sud Ouest, à l'époque, faisait aussi parti de Viapolis. C'était même la tête de pont en France du projet.


Je pense en effet que c'est un bon moyen, pour un quotidien régional, de se mettre à l'heure d'internet via la publication d'infos locales sur un site comme maville.com

Mais ne vaut-il pas mieux se servir de sa marque?



>>Si l'on propose un contenu et un ton différents de ceux du quotidien régional, comment le communiquer, notamment à ceux qui rejettent l'image du journal ?

En adoptant une maquette intelligente, ergonomique, interactive.


>> Et comment adopter un ton plus décalé, plus libre, sans porter atteinte à la marque, plus traditionnelle du journal ?

au contraire, je pense qu'il faut rester fidèle à l'esprit du journal, sinon, c'est d'abord le journal qu'il faut modifier! non?


>> Faut-il créer une marque spécifique, autour du nom de la commune par exemple ? Mais dans ce cas, ne risque-t-on pas de perdre le bénéfice de la marque ?

peut être qu'il est possible de faire les deux, tout simplement. Si l'on prend l'exemple de l'info locale, et bien pourquoi ne pas la mettre à la fois sur www.rennes.maville.com et sur ouestfrance.com/rennes ??


à suivre!

Anonyme a dit…

Ahhh les cityguides... Au-delà du débat autour de la marque... c'est la pertinence du service qui remportera l'adhésion des internautes... Pour la PQR, c'est bien la marque du quotidien qui est le début de tout, qui trimballe l’internaute dans le dédale des marques de pa, de blogs, de photos, de guide et toute la multitude de services qui ont été mis en place au cours des 10 dernières années.

Dans le cas présent, c'est la persévérance qui est récompensée, car comme nous le rappelle Gilles, il y a eu bcp d'initiatives (VivaLaVille, MaVille, Viapolis, Cityvox, Webcity, ParisAvenue, EnVille Wanadoo...).

Maintenant est-ce que une offre comme maville.com (le point FR se ballade ;) est la bonne solution ? Elle est à mon avis un excellent point de départ et l'interaction avec les internautes permettra d'affiner le concept...

Combien ça va rapporter ? Tout d'abord il faut injecter la variable essentielle : la capacité/volonté d'investir des hommes pour faire un vrai service, pas juste une arborescence à la sauce maville.orange.fr.

Quand il s'agit de faire du chiffre, en display ça peut cartonner, comme le fait aujourd'hui le petit frère du PQR66, et en adwords idem, à condition de ne pas filer les clés à n'importe qui :)

De mon point de vue, un cityguide répond à la problématique Grande Métropole dans lesquelles la Quotidienne se fait laminer, mais le concept aboutit n'est pas uniquement sur Internet, mais multicanal : VILLEPLUS + TV URBAINE + MOBILE + WWW + RADIO = cityguide (et la régie vous dit merci ;)

Jeff Mignon a dit…

Hum ! Bonne idée pour Ouest-France, même très bonne… mais pour le reste de la PQR ? Une fois que l'on a vidé les sites des quotidiens de l'info pratique et de la locale sur une autre marque, il reste quoi sur le site du quotidien ?
Quand à l'idée d'aller publier gratuitement sous une autre marque l'info que l'on ne veut pas publier gratuitement sous sa marque… c'est vraiment prendre les internautes pour des abrutis.

hubert guillaud a dit…

Assez d'accord pour dire que le Journal doit rester une marque et donc, une source ! Ca n'empêche pas les déclinaisons et ma ville.com me semble une option, au moins parce que ici, le concept est très fortement identifié à la PQR et que cette suite de service ne mange pas de pain.

Cependant, elle déporte ce qui devrait être le coeur de l'offre en ligne : l'information locale au profit d'une multitude de services, pratiques, essentiels certainement, mais fonctionnant comme autant de silos clos et dont l'animation est laissé aux seuls internautes : où est le journal dans cet ensemble ? Or si les gens souhaitent trouver l'avis des internautes, c'est aussi et surtout avec leur journal qu'ils souhaitent discuter. Si ce n'est pas le cas, il ne faudra pas s'étonner qu'ils partent demain vers le premier nouveau service venu.

Le problème, c'est qu'une fois MaVille.com lancé, tout reste à faire. Mettre les contenus sur le web n'est hélas que la première étape. Et le plus dur est de les faire vivre en ligne.

Là où je rejoint Benoît, c'est que s'il peut y avoir une source commune, il faut ensuite faire vivre cette source, l'animer. Il ne suffit pas comme disait Gilles Bruno de faire une belle maquette et de ne rien changer au fond. Bien sûr, l'idée n'est pas de tout changer brutalement (quoique...), mais il me semble possible et au moins souhaitable d'animer le contenu, comme les silos... Plus encore, d'animer au-delà de son activité, le web local. Ce n'est qu'en devenant un des centres de cette animation, que la presse locale en ligne trouvera un début de renouveau.

Anonyme a dit…

Bonsoir!
Non, les lecteurs ne sont pas fidèles. Il est temps que les gens se le mettent dans la tête. C'est pour cela que tous les DA travaillent la une des journaux et des magazines, car en kiosque, cela fait une lourde différence. Vous êtes partis pour acheter un journal, et hop, vous repartez avec un autre.

Sur les cityguides, je suis très impatient de découvrir :
- la future version de Télérama en ligne (futur cityguide, ou pas?)
- le prochain portail culturel de Hachette (ils viennent de fermer Zurban, pour se reconcentrer sur l'internet dans le domaine)
- la progression de sites comme Evene.fr

je ne comprend pas bien Jeff : mon idée n'est pas de cannibaliser l'info non gratuite d'un quotidien en mettant cette info sur un portail d'un autre nom, cette fois gratuitement.
Prenons une comparaison un peu brutale, le monde de la lessive. Vous achetez une marque concurrente que celle dont vous avez l'habitude , mais en réalité, vous achetez toujours une lessive Henkel. C'est un peu le cas quand un groupe de presse veut créer un journal gratuit pour pouvoir y amasser de la publicité... ou de celui d'un groupe de presse qui mettrait toutes ses infos culturelles locales sur un autre site...

sinon, "VILLEPLUS + TV URBAINE + MOBILE + WWW + RADIO" ah ça oui, cela devrait fonctionner!

Jeff Mignon a dit…

@ Gilles

Je ne réagissais pas à votre commentaire mais à l'idée dont parle Benoît dans son post ici :"Maville.com est une façon de proposer un produit spécifique web alimenté en grande partie par le contenu hyperlocal du quotidien régional, mais sans donner l'impression de mettre le journal gratuitement sur Internet." Idée, qui je sais, traverse l'esprit de certains dans la PQR.

Il ne s'agit donc pas de répétition de contenu mais de la mise en ligne gratuitement sur un site à nouvelle marque de l'info et des PA que l'on ne veut pas mettre gratuitement sur le site du journal.

Quant à la répétition du même contenu sur plusieurs marques pourquoi pas. Sauf que je pense qu'à construire une nouvelle marque, il est plus intéressant de faire l'effort pour une audience spécifique, non touchée par le quotidien papier, et dans un domaine où l'éditeur peut apporter une vraie valeur ajoutée. Par exemple, si j'étais Le Progrès, je me poserais la question d'investir dans une marque football centrée autour de l'OL et/ou dans une marque étudiant.

Anonyme a dit…

http://laft-project.blogspot.com/

Anonyme a dit…

Les journaux présents depuis plusieurs années sur le web ont façonné leur site et leurs contenus au fur et à mesure, en fidèlisant des internautes, en réflechissant à des contenus spécifiques, etc. Pourquoi devraient-ils aujourd'hui tout casser pour adopter un consensuel maville qui n'aura d'effet que de faire ressembler tous les sites de PQR.

De plus, je ne trouve pas du tout convaincant le système maville qui fait qu'on est rebalancé sur un autre site (dont l'internaute ne comprend que trés peu le lien avec le journal) à chaque fois qu'on clique sur une info locale.D'autant que si un internaute se retrouve sur Ouest-France, c'est qu'il cherche la crédibilité et la notoriété de OuestFrance, il peut donc être très perturbé d'être basculer sur un autre site sur lequel n'apparait plus la marque Ouest France.

Il me parait plus intéressant que chacun reste sous sa marque, avec son contenu propre, quitte à réfléchir à des extensions type maville.com (cityguide, homepages zonées...). Et que chacun développe des projets en accord avec les besoins de sa région et la sociologie de ses internautes.

Pitié, ne laissons pas les régies publicitaires décider de ce que doit être la PQR sur internet.

Anonyme a dit…

Et vous, que pensez-vous de l'alliance Presse papier/Site Internet?